21 août 2022

À propos de la Bible

NOUVEAUTÉ


Zachée, 

descend vite ! 

une heureuse rencontre




C’est le titre du recueil d’homélies du Père Nicolas Dayez, ancien abbé de Maredsous décédé le 9 juillet 2021, que viennent de publier les Éditions Saint-Léger.
43 homélies, présentées par le Père Maurice Bogaert moine de Maredsous, sont rassemblées et éditées par Sœur Loyse Morard, bénédictine du Moulin de Maredsous. Toutes commentent le même récit de « l’heureuse rencontre » entre Jésus et le publicain Zachée, et les effets qui s’ensuivirent (Évangile selon saint Luc 19,1-10).

Ces réflexions, reflets de toute une vie, se succèdent au long des ans, en divers lieux et circonstances, depuis le 18 août 1973. Elles se terminent le 14 juillet 2021, jour des funérailles de l’auteur, dont ce dernier avait pris soin de choisir d’avance la lecture évangélique et d’en rédiger l’homélie.


Chacun pourra saisir dans ces pages l’écho d’une expérience personnelle, d’une conviction, d’un désir quotidien et permanent capable de se répercuter à l’infini dans son propre cœur. Ainsi la rencontre de Jésus avec le publicain Zachée continuera à porter ses fruits aujourd’hui, à travers la rencontre de l’auteur et de son lecteur… Souhaitons-le.
Bonne lecture !

Dom Nicolas Dayez osb (1937-2021),
moine de l’abbaye de Maredsous et son septième abbé, continua sa formation musicale au Conservatoire Royal de Bruxelles où il obtint les premiers prix d’harmonie et d’orgue. Licencié en philosophie (Saint-Anselme, Rome), en théologie et en droit canonique (Strasbourg), il est ordonné prêtre en 1967. À la tête de son abbaye depuis 1972, il a présidé pendant trente ans l’anniversaire de la dédicace de l’église abbatiale et bien d’autres célébrations. Ses homélies, toujours nouvelles, étaient écoutées avec plaisir et profit, pas seulement par ses frères moines.









14 août 2022

À propos de la liturgie

 

Fête
de
l’Assomption


Nous continuons à appeler « Magnificat » le cantique de la Vierge Marie. Il a traversé les siècles en gardant toute sa fraîcheur. Comme les Béatitudes, le Notre Père et d’autres textes encore. Quel est le secret de cette fraîcheur ? Y a-t-il moyen de répondre à cette question ?
Il y a tout d’abord le fait que ce texte est tout-à-fait personnel. Il commence par ce qu’on appelait autrefois – peut-être encore aujourd’hui – un adjectif possessif : mon âme, mon esprit, il s’est penché sur moi, humble servante, il a fait pour moi des merveilles. Le « Magnificat » se présente à nous comme une sorte d’autobiographie. Marie nous raconte sa vie, ce qu’elle vit et ce qu’elle traverse, le sens qu’elle donne à tous ces événements. 
Mais attirer ainsi l’attention sur soi, ce serait vite insupportable, s’il n’y avait pas – et tout de suite – le passage à une perspective que nous qualifierions de « mondiale ». Ce qui n’est pas assez dire, et ce qui n’est même pas bien dire. Tous les âges me diront bienheureuse. Nous sommes partis d’une personne concrète, Marie, qu’on peut désigner du doigt. Et sans crier gare, nous passons de suite à un élargissement de ce lien. Marie commence par nous parler à la première personne du singulier, mais elle n’est pas refermée sur elle-même, elle vit et elle communie à tout l’univers, à toute la création, à tous les âges, elle vit aux dimensions de Dieu.

En faisant ainsi, Marie lève pour nous, au moins un peu, le voile du secret de l’éternelle jeunesse de son cantique. Nous n’y pensons peut-être pas assez : le « Magnificat » chante la magnificence. Nous n’utilisons plus beaucoup ce mot pour dire la grandeur de ce que Dieu fait. Marie chante cette grandeur, elle la magnifie. Elle nous dit que Dieu fait cette grandeur avec de la bassesse, comme si on ne pouvait remplir qu’en vidant, comme si on ne pouvait hausser qu’en abaissant, comme si on ne pouvait anoblir qu’en passant par l’ignominie. Dieu le fait depuis toujours et c’est bien pourquoi l’intégrale des générations dira Marie heureuse.
Alors vient la question : est-ce possible qu’une partie de celle qui chante ainsi le « Magnificat » reste en dehors des merveilles de Dieu ? Le Puissant fit pour moi des merveilles : allons-nous mettre une limite à Dieu ? Allons-nous mettre une frontière au-delà de laquelle il n’y a pas d’accès pour la magnificence que Dieu met en œuvre ?
La fête de l’Assomption est la fête de notre réponse à cette question, la fête de la réponse de l’Église. Ce que Marie a chanté, nous le chantons aujourd’hui. Ce que Marie a chanté, l’Église le chante aujourd’hui. Et pour chanter le « Magnificat », il faut une âme que j’oserai dire à la mesure de Dieu. Nous voilà donc invités à quitter toute étroitesse, toute mesquinerie (le contraire de la magnificence), tous ces millimètres avec lesquels nous avons trop tendance à mesurer, même quand il s’agit de Dieu.
La fête de l’Assomption, c’est aussi la fête de la mémoire de Dieu. Et Dieu a une mémoire infaillible. Il se souvient de son amour, de la promesse qu’il a faite à nos pères, en faveur d’Abraham et de sa race à jamais. Voilà finalement le secret de cette jeunesse que j’évoquais en commençant. L’amour peut-il vieillir ? Le nôtre, peut-être, parfois, pas toujours. L’amour de Dieu ne vieillit pas, ne vieillit jamais. Chacune des phrases du chant de Marie vibre de cette constatation, vibre bien davantage de ce que Marie elle-même a accueilli sans réserve, parce que Dieu le lui offrait sans réserve. 
Mon âme exalte le Seigneur. Laissons à notre âme – au moins pour aujourd’hui – la dimension que Dieu lui-même veut lui donner. Laissons-la se dilater. Laissons-la être grande. Laissons-la connaître la magnificence. Laissons-la être jeune. De la jeunesse de Dieu.


P. Nicolas Dayez
Homélie pour la Fête de l’Assomption
Maredsous, le 15 août 2012